Déchiffrer Christopher Owens semble être difficile. Lors du passage de Girls à La Laiterie le 18 novembre 2011, il avait décliné notre demande d’interview : trop fatigué. Mais déçue, et consciente de son amour pour l’écriture, je lui ai fait parvenir une lettre manuscrite en janvier dernier. Un mois plus tard, la réponse me parvenait. Mauvais timing, mauvaise journée, ses réponses gardent parfois les traces de ses sautes d’humeur, aussi délicieuses soient-elles. |
Votre dernier album, Father, Son, Holy Ghost a souvent été cité dans les meilleurs classements 2011. Pensez-vous que votre musique soit comprise par les médias ? Et aimez-vous la façon dont ils en parlent ?
Oui, j’aime les choses que les critiques écrivent. La musique est bien reçue et semble comprise. Vous savez, je crois que si la musique est bonne, elle sera comprise par tout le monde, même si c’est différent pour chacun de nous.
Father, Son, Holy Ghost est différent de vos deux précédents disques : Album et Broken Dreams Club ont été conçus dans des contextes plus intimistes. Mais vous avez aussi travaillé avec Holy Shit. Lorsque vous avez travaillé sur votre dernier album, avez-vous repensé à votre expérience avec eux ?
Le premier album a été le seul à être construit par JR et moi, seuls, dans notre coin. Broken Dreams Club a en fait été l’album auquel le plus de personnes ont participé. On aime travailler avec les autres, et j’aime travailler avec les meilleurs. Parce que je pense que mes chansons méritent le meilleur. La raison pour laquelle on travaillait seul à nos débuts est qu’on n’avait pas d’amis et pas d’argent.
Dans cet album, on trouve une influence forte de la musique traditionnelle américaine : blues, country, gospel, hard rock parfois, pourquoi ce choix ?
Je crois que je n’ai pas besoin d’expliquer ça. Je suis américain, c’est naturel pour moi. Mais c’est aussi faux. Je suis autant influencé par la musique européenne. Je crois que c’est une question d’opinion.
Votre musique va réellement de votre cœur, de vos sentiments, à nos oreilles, est-ce une souffrance ou au contraire une délivrance d’écrire des chansons ?
Une délivrance venant de la souffrance.
Votre relation avec la scène est assez profonde, vous êtes soit très timide, soit très expressif, qu’est-ce qui joue sur votre humeur scénique ?
J’essaye juste d’être moi-même et de rendre une bonne prestation. Je laisse tout derrière moi et me concentre seulement sur ces chansons, sur leurs significations.
Vous parlez parfois de drogues, en avez-vous besoin pour écrire, pour vivre comme certains des musiciens des 60’s, 70’s ?
Blah.
Vous aimez beaucoup lire et avez une bibliothèque impressionnante. Quelle est votre relation avec les livres ? Qu’est-ce que vous lisez en ce moment ?
J’aime lire, c’est intéressant, c’est un médium tellement profond. Je ne peux même pas donner une valeur aux livres, ils offrent une échappatoire, de l’aventure, les réflexions d’autres personnes. Ils nous font réfléchir. Je n’ai pas de livre favori. En ce moment, je lis Interviews from the Paris review, volume 1.
Girls est le nom de votre groupe, et vous êtes assez ambivalent, parfois vous chantez du point de vue d’une fille, parfois non. Souvent, vos chansons portent des noms de filles, pouvez-vous l’expliquer ?
Non.
Vous n’avez pas été très content lorsque Jools Holland a invité Lana Del Rey, alors que vous souhaitiez y jouer depuis très longtemps, que pensez-vous d’elle ?
Je ne pense pas à elle. Le fait que les gens y pensent montre à quel point le monde est stupide. Je lui souhaite le meilleur, mais je ne sais rien d’elle. Et cette question m’énerve.
Que peut-on vous souhaiter pour 2012 ?
Je veux disparaître.
Propos manuscrits recueillis par Cécile Becker
Article paru dans Novo 19 (avril-mai 2012)