Lovée comme un chat dans le fauteuil de son appartement parisien, douce et calme, maniant volontiers l’humour, Lucie Durbiano raconte avec encore une toute petite pointe d’accent du sud-ouest, son parcours. Il y a un peu d’enfance dans son ton et dans sa personne. Elle en joue avec une distance et une lucidité amusée. « Petite je me racontais déjà des histoires à voix haute, en gribouillant sur du papier. »

Née à Castelsarrasin tout près de Montauban, elle a passé son enfance à Limoux, là où on fabrique un nectar pétillant. Père garagiste, mère à la maison, lorsqu’elle s’ennuie un peu, elle dessine beaucoup et son jeu préféré, c’est de raconter des histoires qui n’en finissent pas. Elle lit et relit des dizaines de fois tous les Tintin de la collection de son papa. Elle sait qu’elle veut devenir artiste, mais ne sait pas encore que c’est dans la bande dessinée que son art va éclore. À la fin du lycée, elle décide de faire des études d’art, d’abord à la Villa Arson à Nice puis passe avec succès l’Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg. Après cinq années passées en Alsace où elle étudie dans l’atelier illustration de Claude Lapointe, elle repart avec un bébé, des rêves un peu plus concrets et une ribambelle d’amis sur qui elle peut encore compter. Elle y rencontre Anouck Ricard, « C’est une vraie amie et j’adore ce qu’elle fait, il n’y a rien de plus drôle que Anna et Froga et L’Inspecteur Toumi. » Après avoir vécu quelques années près d’Avignon, elle s’installe à Paris avec ses deux filles et vit (presque) correctement de son art. Son premier livre illustré pour enfants La bise du Renne paraît en 1999. Suit la série des Lulu Grenadine, une adaptation de Hansel et Gretel, puis un livre pédagogique intitulé N’oublie pas d’aller voter. Elle crée aussi la série des Mastic, le petit souriceau éducatif pour enfant et travaille pour Pomme d’Api, Toboggan et Astrapi.

Elle publie entre temps sa première BD adultes en  2004, Laurence, aux Editions les Requins Marteaux puis viennent aux éditions Gallimard-Collection Bayou, Orage et désespoir et Le Rouge vous va si bien, largement salués par la critique.

Sous des dehors naïfs et romanesques, son univers tragi-comique évoque à la fois les romans feuilletons du début du siècle dernier et les films de Rohmer. Ses histoires courtes ou longues ont un goût doux-amer baigné d’un humour un peu décalé.

Trésors, son dernier ouvrage, dans lequel il est question d’une chasse au trésor, sur fonds de marivaudage avec un brin de perversité, confirme son vrai talent d’auteur. Dans cet album subtilement illustré (sélection officielle du Festival d’Angoulême 2009), on suit les aventures de Christine, qui est sans nul doute la cousine cachée de Tintin. C’est du Hergé, mais avec des baisers, des jolies filles et un peu de sexe. « Comme dans la vie quoi ! » dit-elle, avec un sourire en coin.

Sa prochaine BD sera « un road-movie dans l’espace, un chassé-croisé amoureux, avec une bonne dose de science fiction ! » qu’elle va co-écrire pour la première fois avec un ami. Bien sûr, histoires d’amours et suspense seront au rendez-vous !

Bibliographie :

Trésor, collection Bayou, Gallimard, 2008,
Le rouge vous va si bien, collection Bayou, Gallimard, 2007
Orage et désespoir, collection Bayou, Gallimard, 2006
Bizou, Les Requins marteaux, 2004
Laurence, Les Requins marteaux, 2004

Propos recueillis par Denis Ritter
Illustrations originales de Lucie Durbiano

Article paru dans le numéro zéro de Zut !, décembre 2008