Pauvres Zhéros, de Baru et Pierre Pelot

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On le sait d’expérience, avec Baru, point de rémission possible. La description qu’il fait d’un petit village de l’Est de la France en dit long sur la veulerie de notre temps. Autour de la disparition d’un gamin mongolien s’active le monde des petites gens que seule la misère morale réunit. On les a tous croisés dans la vraie vie, ces personnages dont on n’ose s’avouer qu’ils existent. Ici, c’est le maire, le médecin-chef de l’institut, les employés de l’hospice, le curé, le receleur paranoïaque ou le truand à la petite semaine ; inutile de leur chercher noise, le système les protège. Manucci a beau savoir, il a lui-même souffert, mais on l’empêche de dire. C’est naturellement à sa petite amie qu’on fait porter le chapeau. Le moins qu’on puisse dire c’est que cette sublime adaptation retourne le lecteur. Celui-ci se trouve brutalement confronté à un niveau de désespoir dont il a toujours souhaité nier l’existence. Dès lors, il s’interroge sur ses propres fonctionnements intérieurs et se demande dans quelle mesure il ne participe pas lui-même à cet environnement destructeur implacable, dépeint ici avec une expressivité graphique déroutante. (E.A.)
De Baru et Pierre Pelot, Rivages/Casterman/Noir


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